mardi 26 février 2019

PMA et moi

Je suis SOPK.

En d’autres termes, j’ai le syndrome des ovaires polykystiques. 

Je ne suis pas médecin, je ne vais donc pas vous donner une définition scientifique du SOPK, mais voilà comment on me l’a décrit au moment où on me l’a annoncé :

"C’est un état. Un dérèglement hormonal général, les hormones sont sécrétées de façon irrégulière  et en quantité anarchique. "
Et dans mon cas plus particulièrement : "Les ovaires travaillent en sur-régime sans arrêt mais de manière inefficace, les follicules sont très nombreux (18, 19, 20...) mais aucun n'arrive à maturité.
 Il n’y a donc pas d’ovulation.
Plus de règles.
Cela ne veut pas dire que vous êtes stérile, mais vous n’aurez peut-être jamais d’enfant."

A l’époque au début des années 2000, j’ai tenté de trouver des explications, mais je n’ai pas trouvé grand chose.... 
Les généralités étaient toujours les mêmes : Environ 10% de femmes touchées, troubles des menstruations, possibilité d’acné ou de pilosité importante, risque plus élevé de développer le syndrome sur sujets obèses.

Il y a quelques années en arrière on a mis en cause le bisphénol A...
Aujourd’hui on parle d'un rapport possible avec plusieurs perturbateurs endocriniens.

Aucun élément n’a pu me donner de réelles explications et j’ai arrêté depuis très longtemps d’essayer de comprendre car peu importe la cause, cela n'aurait rien changé à ce SOPK.

Il fallait donc l'accepter.

Ce n’était pas si simple à vrai dire.

C’est à ce moment que j’ai commencé un parcours PMA.
(Je vous fais grâce de la paperasse à remplir à l’époque et des délais de prise en charge, même si je sais qu’à ce jour le sujet n’a pas beaucoup avancé.)

En tout, du début de mon parcours PMA à l’heureuse nouvelle de ma première grossesse, il y aura eu 5 ans.
Si on devait rajouter les années avant la prise en charge de la PMA, on serait à 8.

En l’espace de 5 ans il s’en passe des choses, d’un point de vue médical, mais également d’un point de vue personnel. 
Personnellement, l’événement le plus marquant si je peux le dire ainsi, c’est que j’y ai laissé mon couple à l'époque.
Je n’ai pas de regret, car dans une séparation, tout un tas de choses rentrent en jeu. Mais il est certain que l’attente abominable pendant des années avant la PMA avec un projet qui n’aboutit pas, puis la PMA lourde, pesante, et qui traîne en longueur elle aussi, n’ont rien arrangé. 

J’avais testé les stimulations hormonales avec des cachets, en modifiant les dosages, en alternant tentatives et cycles au repos. 
J’avais testé des stimulations hormonales par injections. J'ai découvert l’appréhension de devoir se piquer, les bleus dans le ventre, les effets indésirables.

J’ai espéré, désespéré, souffert, pleuré puis...

La vie, le destin, l’inconscient, je ne sais pas à vrai dire, mais j’ai tourné une page.

Je me suis autorisée à vivre ma vie, ma vie en dehors de la PMA.

Je me suis séparée. J’ai vécu "libre" comme jamais je ne l’avais ressenti avant, libre de mon temps, libre de mes décisions, libre de mes choix, libre de mon cœur, libre de mon corps.

J’ai rencontré mon mari dans ce sentiment de liberté.

Le positif?
J’avais une parfaite connaissance de mon état, de mon infertilité, de la possibilité qu’une grossesse n’arrive jamais, de la probabilité que nous ne devenions jamais parents mais que peut-être nous resterions 2. 

Nous étions en accord dès le départ, pourquoi attendre ou repousser un projet qui n'arriverait peut-être pas ou dans un espace temps que nous ne maîtrisions pas?

La reprise en charge de la PMA dans le Var a été plus rapide compte tenu du dossier, et je n'ai jamais entendu le fameux: "Vous êtes jeune, en bonne santé, cela va arriver."

Il n'était plus question de refaire des stimulations hormonales suite aux multiples échecs dans le passé.

Un an plus tard nous avons alors entamé une procédure pour une 
 IAC (insémination artificielle avec conjoint ou intra couple). 

...

Soldée par ce qui s'appelle une fausse couche précoce (la veille de Noël)


Cette fois-ci, il n'était pas question de se perdre, soi-même déjà, ni l'un et l'autre. Les émotions ravivées étaient bien présentes mais je ne voulais pas qu'elles prennent le dessus et nous renferment dans cet enfer que j'avais déjà connu.

Certaines épreuves de la vie rapprochent, d'autres éloignent.
On ne le sait pas toujours car on ne maîtrise pas grand chose, mais là, j'en avais conscience.

On a décidé d'une "pause" PMA de quelques mois.

J'ai pris de nouvelles fonctions professionnelles. A la question " souhaitez-vous des enfants?" j'ai répondu oui, mais que malheureusement, cela n'arriverait jamais.
La femme assise devant moi m'a répondu: "Il faut toujours y croire"

Je n'ai pas eu d'autres règles, j'avais maintenant l'habitude.

J'ai eu quelques maux d'estomac quelques mois plus tard, dans des conditions curieuses. A la danse notamment lors de certains mouvements. Ma prof m'a demandé si j'étais enceinte.

La blague! Mais cependant cela m'a interpellé...

J'ai fait un test de grossesse en pleine journée. Je n'ai même pas attendu, il était positif ( j'ai tout de suite pensé qu'il ne marchait pas! Encore un! Mais quand même...)

J'ai fait une prise de sang. 

" Vous êtes enceinte, et bien enceinte, d'au moins 6 semaines!"


Une IAC, une fausse couche précoce, un cycle de 60 jours et un miracle? Un choc oui! Un réel choc. J'étais tellement prête que je n'étais plus prête...

Le lendemain, croyez le ou non, je ne fermais plus aucun pantalon. Le week-end suivant j'achetais des vêtements de grossesse.

Puis j'ai fait une écho et j'ai découvert mon mini alien.

Il était bien là, et la date estimée de conception correspondait au fameux "il faut toujours y croire".

La PMA et moi, ça ne s'est pas arrêté là, mais le plus dur était déjà derrière moi.

Il faut toujours y croire.


Nous avons cru en Louis, et il nous a fait devenir parents.
Notre histoire, notre "combat", notre bébé miracle.

Merci la vie.








lundi 4 février 2019

Infertilité, infécondité, inégalité, réalité

le cycle de la femme, tel qu’on nous l’apprend à l’école. 
Une belle théorie, simple à comprendre et rassurante. 
Mais dans la pratique?

Bref, je ne suis absolument pas là pour vous faire un cours de science, et encore moins pour vous donner des avis médicaux, mais pour partager avec vous mon expérience de l’infertilité.



J’ai voulu être mère très jeune, j’étais prête psychologiquement et physiquement vers 20 ans. A l’arrêt de la pilule, comme bon nombre d’entre nous, j’étais surexcitée à l’idée de me dire que désormais une grossesse pouvait survenir et que quelques mois plus tard je réaliserai mon rêve d’être mère.

Mais voilà, ce n’était pas si simple. Le corps a repris ses droits et n’en a fait qu’à sa tête. Alors les cycles de 28 jours théoriques , je ne me souviens même pas en avoir eu...

Remis dans son contexte, à l’époque on m’avait dit qu’une première grossesse pouvait mettre entre 12 à 18 mois alors...
j’ai patienté, j’ai espéré, j’y ai cru, j’ai été déçue...
J’avais ce que je pensais être des retards de règles (retard de règles=bonne nouvelle? Et bien non!), et j’ai fait de nombreux tests de grossesse (oui,oui, on ne sait jamais, peut-être que le premier ne fonctionnait pas...).

Je suis allée consulter.
« Vous êtes jeune, en bonne santé, il faut être patient c’est tout. Aujourd’hui les gens aimeraient avoir un enfant aussi vite que s’ils achetaient un machine à laver ».

Je m’en souviens comme si c’était hier.

La patience... et un grand sentiment de solitude aussi. On se questionne, on se remet en question, on se culpabilise, ma vie s'est mise à tourner autour de cet unique projet qui n’aboutissait pas.

Je suis allée consulter de nouveau l’année suivante.
Mais je suis jeune et en bonne santé bordel! Qu’est-que je viens l’emmerder avec mes doutes et mes questions?

Ce n’est évidemment pas ce que le gynécologue m’a dit, mais c’est bel et bien le ressenti que j’ai eu en sortant de son cabinet.

Je crois qu’à partir de ce moment, j’ai commencé à en parler à mon entourage. Je n’attendais pas vraiment de conseils mais j’avais besoin d’extérioriser ce mal être.
Les réactions ont été multiples, certaines compréhensives, d’autres attentives, et certaines absolument pas. Chacun y va de sa propre théorie donc c’est très délicat...

Mes amies, pour la plupart, ont été remarquables. Soutenantes, encourageantes, et surtout elles ont toujours eu beaucoup de tact. Parce que oui, à 24,25 ans les premières annonces de grossesse ont commencé à arriver.
Je n’étais pas la seule à vouloir être mère.

Je n’ai jamais ressenti de jalousie, envers des amies enceintes, mais pendant longtemps je n’arrivais pas non plus à être heureuse pour elles, sans ressentir un certain sentiment d’injustice.

Le couple? Ah il en prend un coup aussi... certaines épreuves rapprochent, d’autres éloignent. En ce qui me concerne c’était plutôt la deuxième option.

Devant ma solitude, j’ai cherché tous les moyens pour pouvoir tomber enceinte.

C’est là que tu penses qu’internet est ton meilleur ami. 

Tu te retrouves sur des forums de discussions, tu lis tout un tas de choses, de publicités, de produits miracles, qui au final te font de nouveau espérer.

J’ai tenté des méthodes naturelles type homéopathie, aromathérapie, des tisanes, des cachets de vitamines, des aliments pour booster la fertilité.
Utile ou pas? C’était surtout inapproprié dans mon cas, mais comme j’étais la seule préoccupée par ce désir de grossesse, j’ai tout tenté.
Les positions sexuelles aussi. La fréquence des rapports ( un savant calcul tout ça, qui ne laissait plus vraiment de place à la spontanéité).

Une des plus grosses idioties, a été de tenter les tests d’ovulation. Car devinez quoi? Ils étaient quasi tout le temps positifs!  Espoirs, espoir, espoir, désespoir!

Bon, après tout ce temps, il fallait se rendre à l’évidence, quelque chose ne tournait pas rond. Parfois j’avais mes règles au bout de 60 jours, parfois au bout de 90 jours....jusqu’au jour où elles ne sont plus du tout arrivées.

Alors on se plaint tout le temps d’avoir nos règles, mais en fait lorsqu’on ne les a plus, c’est pire. C’est comme si inconsciemment on t’enlevait une partie de féminité, celle qui porte le sens de la maternité, de la procréation.

J’ai décidé de changer de gynécologue, j’ai pris un grand nom de la région.
Pourquoi? Sans doute parce que c’était rassurant, parce que lui, il m’aiderait c’est sur (Je l'espérais tellement qu'il ne pouvait pas en être autrement).
Des mois d’attente pour obtenir un rdv.

Le jour J!
Je me présente, j’explique ma situation depuis ces dernières années.
« Vous êtes jeune... »
J’ai insisté.
J’ai expliqué que je n’avais plus de règles depuis des mois.
« Vous devez les avoir, mais vous ne vous en rendez pas compte, on se revoit dans 6 mois ».

Que dire... je n’ai même pas les mots pour décrire.

6 mois plus tard, nous nous sommes revus. Et j’ai eu des tests sanguins à réaliser à plusieurs périodes dans le mois.
A la suite des tests, silence radio...
J’ai tenté de contacter le gynécologue, mais on me répondait à chaque fois : «  Le médecin vous apportera une réponse par courrier ».

Et un jour dans la boite aux lettres j’ai reçu une réponse!!!! Mélange d’excitation, d’angoisse, de soulagement, j’allais enfin savoir.

1 phrase, une seule. J’ai toujours cette lettre:
«  les résultats de vos examens montre un cycle anovulatoire, à voir lors de votre prochaine consultation ».

Quoi? C’est tout? On ne pouvait pas me le dire au téléphone? Et puis ça finalement, je m’en doutais un peu déjà...!

Rdv suivant, le gynécologue me prescrit le fameux Clomid dont je vois le nom partout sur les forums.  mais dont je ne connais rien. Un fort dosage pour mon poids de l’époque (45kg).
La consigne c’est de commencer le traitement le premier jour des règles.

Mais je n’ai pas mes règles...

Je commence donc le traitement au hasard de la période.
Pas de suivi, pas de contrôle.... et quelques jours plus tard je me retrouve avec une hyper stimulation ovarienne avec tous les désagréments et les risques que cela comporte.

Je suis désespérée. Je me sens seule, incomprise, désemparée, et je confie mon desarroi à mon médecin traitant de l’époque.
Celui-ci n’a pas la solution mais, il me donne des coordonnées. Il m’oriente vers un gynécologue et fait en sorte de m’obtenir un rendez-vous dans les jours qui suivent.

Ce gynécologue en question. Je lui voue une éternelle gratitude. Je ne suis pas tombée enceinte dans les mois qui ont suivi, il n’a pas trouvé « de solution » mais il a transformé ma vie, il m’a sauvé.

Il m’a reçu, m’a longuement écouté, et m’a dit qu’il allait tenter de comprendre à l’aide de questions, d’examens complémentaires et que je ne ressortirai pas tant qu’on aurait pas des pistes à explorer.
Je suis restée 2 heures dans son cabinet, bien plus que de la gynécologie, il y avait ce côté accompagnement psychologique, cette recherche biographique, une dimension analytique de mes habitudes de vie alimentaire, sommeil, antécédents...

Il a émis quelques hypothèses et à ciblé des examens à réaliser.

Dans le mois qui a suivi, on a pu mettre un mot, un mot un peu bizarre, qui fait peur.
Ce mot n'est pas une maladie mais plutôt un état.

Je suis SOPK.

Quoi? C'est quoi ça?
En gros résumé, il s'agit d'un dérèglement hormonal général. Les hormones sécrétées par l'organisme ne surviennent pas au bon moment, ou en quantité suffisante, ou pas dans l'ordre "logique". On en reparlera plus longuement, mais voilà je savais enfin ce qu'il en était.

Mes ovaires travaillaient à bloc, tout le temps, mais de façon inefficace. Je n'avais donc aucune ovulation, et aucune règle.

Je n'avais pas rêvé, je n'étais pas folle.

Après tout ce temps, le parcours ne faisait que commencer finalement, mais je me sentais un peu moins seule.

Vous vous doutez bien que l'histoire connaît une fin heureuse, miraculeuse même! Je me sens très chanceuse malgré toutes ces épreuves.
Et avec le recul, beaucoup de recul, je ne connais finalement que des fins heureuses dans tous les cas d'infertilité portés à ma connaissance. La seule chose qui n'est absolument pas maîtrisable, c'est le temps qui passe, et c'est le ou les moyens pour y parvenir.

Il faut toujours y croire.

L'accompagnement psychologique dans tout ça? Peu ou pas existant, peu importe les raisons. 
Mais cela en fait une raison supplémentaire pour moi aujourd'hui dans mon choix professionnel de demain.
Je souhaite plus que tout pouvoir apporter une écoute, un mot, une bienveillance, une compréhension à celles (et ceux) qui en auront le besoin à un moment dans leur vie. Il suffit parfois de peu, mais le fait d'être considéré, accompagné, peut faire bouger beaucoup de choses.

Comme ce gynécologue, qui ce jour là, a pris le temps pour moi. Je n'ai pas eu de contact depuis plus 12 ans mais je n'oublierai jamais...Merci Docteur.